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7 octobre 2012

BRÉSIL: A qui profitent le fric, le foot et les JO ?

Filed under: sport — reporters @ 16 h 21 min

• En pleins préparatifs de la Coupe du monde de football 2014 et des Jeux olympiques 2016, la sixième puissance économique mondiale attise toutes les convoitises…

Dessin de Boligán paru dans El Universal, Mexico.

Le Brésil a le vent en poupe, personne ne peut le nier. Désormais membre du club très fermé des grandes puissances, sixième économie de la planète, le leader indiscuté de l’Amérique latine, pour couronner le tout, va organiser deux des plus grands événements sportifs internationaux ordinairement réservés à quelques pays triés sur le volet : la Coupe du monde de football 2014 et les Jeux olympiques de 2016 à Rio. En échange de cette manne commerciale, le Brésil a promis d’opérer sa mutation à un rythme accéléré. Mais à quel prix ?

Les chiffres avancés ont de quoi faire perdre la tête alors que l’économie marque son premier temps d’arrêt (la croissance du PIB, de 2,5 % en 2011, est en deçà des prévisions) : 11 milliards d’euros dans les chantiers de la Coupe du monde et 14 milliards d’euros pour les Jeux olympiques, 330 000 emplois fixes et 380 000 emplois temporaires créés, un afflux d’environ 3 millions de touristes. Et, évidemment, tout le monde veut sa part du gâteau. “lls vont s’en mettre plein les poches, sans le moindre scrupule”, prédit Romário Da Souza Faria, ancienne star de la sélection brésilienne et aujourd’hui député [socialiste], faisant allusion aux marchés publics attribués pour la Coupe du monde de football. “Je me suis rendu dans les douze villes du Mondial : la construction de certains stades est déjà suspendue pour pouvoir ensuite les classer en ‘chantiers d’urgence’ et ainsi échapper aux exigences des appels d’offres. Je n’ose imaginer combien tout cela va nous coûter”, affirme l’ancien footballeur.

Marchandage

Tout le monde craint en effet le retour des “éléphants blancs”, ces constructions pharaoniques érigées à l’occasion des Jeux panaméricains de 2007 à Rio, qui sont devenus obsolètes une fois les festivités sportives terminées. Romário et le Brésil ont de bonnes raisons de s’inquiéter : les exonérations accordées aux entrepreneurs par Brasília depuis 2011 font gagner du temps grâce à des contrats plus flexibles, mais sont la porte ouverte à une corruption généralisée.

Et la corruption est un mot qui fâche le gouvernement de Dilma Rousseff. Plusieurs des quatorze ministres invités à quitter leur poste pour corruption ont démissionné à la suite d’affaires directement liées aux juteux contrats du Mondial : Mario Negromonte, ex-ministre de la Ville

[démissionnaire en février] et chargé des projets de liaison entre les sites; Pedro Novais, ministre du Tourisme [démissionnaire en septembre 2011], accusé d’avoir favorisé certaines entreprises dans le programme de formation du personnel de service pour la Coupe du monde ; Orlando Silva, ex-ministre des Sports [démissionnaire en octobre 2011]. Même Ricardo Teixera [démissionnaire en mars 2012], qui depuis vingt-trois ans régnait en maître sur le football brésilien [il était à la tête de la Confédération brésilienne de football (CBF) et du Comité organisateur (COL) du Mondial 2014], est accusé de malversations.

Dans le document “Grands événements et violations des droits de l’homme au Brésil”, les Comités citoyens de la Coupe du monde – des associations de militants implantés sur les sites du tournoi [portalpopulardacopa.org.br/index.php]– fustigent un modèle qui permet aux “entreprises nationales et internationales de soumettre le pays et les citoyens à leurs caprices ou plutôt à leurs intérêts.”

Le projet de loi pour la régulation de la Coupe du monde 2014 [approuvé le 9 mai par le Congrès brésilien et en attente de signature présidentielle], que la Fifa impose comme cadre économique légal au pays, va à l’encontre de la législation brésilienne. Citons quelques exemples : vente d’alcool dans les stades – interdite au Brésil ; interdiction des tarifs préférentiels aux étudiants, aux handicapés, aux bas revenus et aux retraités ; suspension de la “loi Pelé”, qui distribue 5 % des droits télévisés aux associations sportives… A l’heure des marchandages, le rayonnement mondial du Brésil passe forcément par une série de compromis. Barack Obama a été clair : “Les Etats-Unis ne veulent pas assister aux Jeux olympiques sur le banc de touche nous voulons nous assurer que les entreprises nord-américaines joueront un rôle actif dans le processus. Le Brésil a besoin de construire de nouvelles routes, des ponts et des stades, et nos entreprises sont prêtes à les aider à relever le défi.”

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