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7 octobre 2012

ESPAGNE: Des coopératives pour affronter la crise

Filed under: monde — reporters @ 16 h 25 min

• Des citoyens s’organisent face à la crise en créant des coopératives qui répondent aux aspirations des citoyens. Sport, fêtes, paniers bio, mais aussi maison de retraite, énergie renouvelable : rien de tel que de s’associer entre particuliers à l’heure où les services publics sont en retrait.

L’un des emblématiques taureaux Osborne, une publicité des années 1960, ici détournée par l’artiste Sam3. L’un des emblématiques taureaux Osborne, une publicité des années 1960, ici détournée parl’artiste Sam3.
Le complexe sportif Manuel Santos García, situé dans la localité sévillane de Gerena, est un vivier d’activités. Il y a des cours de natation et de gym aquatique à la piscine climatisée, des cours de basket, de foot en salle, de danse et de patinage. Et ce n’est pas la municipalité qu’il faut féliciter pour cette initiative – elle a la corde au cou, comme partout ailleurs –, mais la persévérance de quatre habitants qui ont décidé de faire tout leur possible pour profiter au maximum de ce centre, construit grâce aux fonds du Plan espagnol de relance pour l’économie et l’emploi.Après une inauguration en grande pompe en 2008, les infrastructures, faute de budget, ont été très peu utilisées jusqu’au début de l’année 2011. La mairie étant incapable de tirer profit du complexe, les quatre citoyens ont décidé de prendre les choses en main. Ils ont créé une coopérative, Aquasport, et présenté un dossier dans le cadre de l’appel d’offres public, afin d’obtenir la gestion des installations.

C’est en janvier 2011, après l’avoir remporté, qu’ils ont véritablement lancé leur projet : transformer les locaux en un espace dynamique, ouvert à toute proposition qui puisse rendre service à la population. Maintenant, même des fêtes et des anniversaires y sont organisés. Les coopératives prennent en charge une partie des fonctions sociales dont l’Etat-providence ne peut plus s’occuper à cause de la crise.

Et les domaines concernés sont de plus en plus nombreux : santé, assistance aux personnes dépendantes et handicapées, services financiers, enseignement, énergies renouvelables, activités culturelles, agriculture… “A l’origine de ces initiatives, on trouve une coopération entre les habitants qui n’attendent pas que les administrations publiques résolvent les problèmes, préférant trouver une solution par leurs propres moyens”, analyse Iñigo Bandrés, qui travaille pour le Réseau d’économie sociale et alternative (Reas). Ana Isabel Ceballo, présidente de l’Union espagnole des coopératives de consommateurs et d’usagers (UNCCUE), poursuit : “Après la guerre civile [1936-1939], de nombreux villages qui n’avaient pas l’électricité ou l’eau courante ont créé des coopératives. Aujourd’hui, ce modèle peut aider à faire face aux coupes budgétaires qu’opèrent les gouvernements dans les services sociaux.”

Une maison de retraite sur mesure

Le centre Servimayor est né pour fournir un service que les pouvoirs publics n’étaient pas à même de procurer : une maison de retraite qui semblait nécessaire au village de Losar de la Vera, 3 200 habitants (dans la province de Cáceres, dans l’ouest du pays). Santiago Cañadas, qui avait alors 74 ans, a eu l’idée de s’associer avec l’un de ses voisins pour construire cette résidence. “On souhaitait avoir un endroit correct où aller lorsqu’il devient impossible d’être autonome. Les résidences privées ne nous plaisent pas, car là-bas l’argent compte plus que les personnes. C’est pour ça que nous avons pensé à un autre modèle”, explique Santiago Cañadas.

L’idée était de ne pas dépendre de l’administration ni des enfants, et de pouvoir accéder à cette maison au prix de revient une fois réglé l’investissement initial. Servimayor a ouvert ses portes en 2010 et compte 124 chambres. Le centre comporte un jardin potager, et un physiothérapeute et un coiffeur viennent plusieurs fois par semaine. La résidence a 150 associés, dont 90 ne sont pas à la retraite.

Francisco Martín, par exemple, a 57 ans : comme lui, d’autres personnes peuvent céder leur place à leurs parents ou décider de la remettre sur le marché.

Selon Félix Martín, secrétaire général de la Confédération espagnole des coopératives de consommateurs et d’usagers (Hispacoop), ce type de structures comble certes un vide laissé par l’affaiblissement de l’Etat-providence, mais elles représentent aussi un bon moyen de lancer une entreprise en temps de crise. “C’est plus naturel et plus solide, car il y a des associés. Ainsi, les risques s’en trouvent réduits”, assure-t-il.

Moins de risques, plus de social

Les coopératives bénéficient de quelques avantages fiscaux. Toutefois, la formule ne trouve pas un appui suffisant de la part des pouvoirs publics, selon des experts. “Il n’y a pas d’aides ni de politiques en faveur de l’économie sociale ou des coopératives”, affirme Iñigo Bandrés. De nombreuses structures dédiées à la gestion des services publics voient une grande partie des subventions qui les alimentent continuer de chuter.

Malgré tout, les coopératives résistent mieux aux coups infligés par la crise que d’autres types d’entreprises.

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